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La cueillette des champignons (u muratincu)
C’est une passion que l'on attrape lorsque l'on est tout gosse et toute sa vie on lui reste fidèle. Aussi dès l'automne venu, on scrute le ciel, appelant de ses voeux cette eau bienfaitrice qui rafraîchit l'atmosphère après l'été torride et qui, si elle tombe à la bonne lune, fera pousser les champignons à foison.
Car la lune, ça compte. En tout cas, les gens des villages, instruits à l'école de la nature, y croient dur comme fer. Les premiers champignons à surgir, ce sont les oronges. Quel merveilleux et émouvant spectacle que la vue d'un parterre parsemé d'oronges! C'est l'amanite des Césars, facilement reconnaissable à son chapeau orange vif et ses lamelles jaunes. Avant, c'est un œuf tout rond dont la coquille éclate sous l'effet du chapeau coloré et luisant. Ce champignon ne peut être confondu avec aucun autre et c'est le meilleur qui soit, qu'on le consomme cru en salade ou cuit.




Réglementer la cueillette pour éviter l'épuisement des terres

Il est vivement conseillé de ne pas cueillir les petits œufs tout blancs. Ils ne sont d'aucune utilité culinaire et le champignon n'a pas le temps de lâcher ses spores pour se reproduire. Tous tes vrais paysans ont d'instinct ce comportement. Pourtant, les arrivées massives de cueilleurs étrangers au pays, venant même parfois d'Italie, aboutissent à de véritables razzias. Il faudra bien un jour réglementer tout cela sous peine de voir la terre s'épuiser.
Je me souviens du temps béni où, tout jeune encore, je partais à la cueillette des oronges, vers la fin septembre, au moment où les paysans coupaient la fougère à la faucille pour ramasser ensuite les chataîgnes. ! C'est mon père qui donnait le signal du départ. La veille, il avait préparé deux grands paniers, Ecoffe, que l'on attachait sur le bât de l'âne. Et dès potron-minet, après une nuit agitée par l'excitation, nous partions alors que la nuit était encore noire afin d'être sur place dès que la journée ouvrirait ses paupières.
Il fallait être les premiers sur place. Ce n'est pas que la concurrence fut rude. Les régens, à l'époque, avaient d'autres priorités. Mais il fallait arriver avant les bêtes lâchées dans la nature et qui se régalaient aussi de cette délicate nourriture.
Arrivée à l'orée de la forêt de ! châtaigniers, nous nous séparions, mon père à pied, moi sur mon âne. J'étais alors livré à moi-même. La forêt me paraissait immense et j'avais très peur de me perdre. Mon père me disait alors: "laisse marcher l'âne, il connaît le chemin. Nous nous retrouverons à tel lieu-dit, une maisonnette en ruine".
Alors, commençait pour moi une période d'angoisse apeurée et de bonheur intense. Angoisse de ne pas retrouver mon chemin et bonheur de la découverte dans la solitude la plus totale. Et comme mon âne flânait souvent et que moi-même je rêvassais parfois, il n'était pas rare que mon père soit le premier arrivé au lieu de rendez-vous.
Un jour, nous devions nous rejoindre pour le repas de midi près d'une aire de battage, Un Aghja, où coulait une petite source, un filet d'eau fraîche sous la fougère. Mon père m'attendait. Il me dit alors malicieusement: "va chercher la musette à provisions qui se trouve au pied de ce gros châtaignier."
Je m'empressais car j'avais faim. Mon père me demanda si je n'avais rien vu. Sur ma réponse négative, il m'invita à aller voir de plus près, là où la musette était posée. je ne vis toujours rien. Il s'approcha alors et me montra un énorme champignon sur lequel la musette avait été posée. Je n'avais rien vu car il se confondait avec la terre. Mais! c' est ainsi que je vis pour la première fois en place, un énorme plypore chevelu, "A Gallinula".
Un champignon mythique
C'est un champignon mythique qui pousse au pied des très gros châtaigniers.
Malgré sa grande taille, il passe souvent inaperçu car il est réellement couleur terre. Et depuis, dés que la saison le permet, je pars à la recherche des "Gallinule" pour l'intérêt gastronomique certes, mais aussi pour le coup au cœur que produit ce champignon rare, impressionnant autant que délicieux.
Et puis en fin de saison, au moment des châtaignes, arrivent les girolles qui se cachent sous les feuilles au milieu des bruyères. On passe de l'orange au jaune éclatant. C'est un plaisir infini de voir pointer les corolles lumineuses que l'on découvre avec frénésie, fouillant sous les feuilles, pour remplir de pleins paniers. Quelle bonne odeur! Et quelle saveur en perspective!
La saison s'échelonne, car viennent ensuite les champignons que l'on trouve sous les chênes et dans le maquis - E Leca Pecure, les beaux cèpes aux larges sombreros, Erbitrozi, russules que l'on trouve au pied des arbousiers appelés chez nous" Erbitri" et puis l Cimbalulli, vastes cymbales blanches dont on se régale accompagnés de haricots soissons, gros comme des fèves, "l Favoni".
Mais tous ceux là viennent bien tard. L'école est commencée, et on les laisse volontiers pour ceux qui trop occupés par la cueillette des châtaignes, n'ont pu ramasser les merveilles.
En Corse, pour peu qu'il pleuve, la saison des champignons peut commencer très tôt mais elle se termine très tard, jusqu'en janvier en bord de mer.
Les champignons foisonnent. On peut les conserver selon divers procédés: Bocaux, séchage ou même congélation.
Pour que ce paradis des amateurs de champignons puisse durer longtemps, il suffit de quelques précautions simpIes: Ne pas cueillir les champignons trop jeunes, ne pas détruire ceux quine sont plus utilisables, couper le pied, ne pas trop remuer la terre et surtout éviter de faire des razzias, car en Corse, nous savons trop ce que les razzias nous ont coûté. .
U Muratincu