LE NOM DE LA CORSE

 

 

 

 

 




La Corse

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La Corse était appelée Kurnos, qu'il faut prononcer Kyrnos, par les Grecs anciens. Le nom a été composé avec la racine phénicienne Kur ou Kyr, signifiant pointe, cap, promontoire. Il n'est pas douteux que ces navigateurs avaient baptisé l'île d'un nom exprimant la forte impression qu'elle leur fit, toute hérissée de pointes et de promontoires, quand ils l'abordèrent par le sud ou par l'ouest.
Dans la prononciation grecque, le K était mouillé Kyrnos devenait donc, en parlant Cyrnos. On pourrait penser que Corsica n'est que la transformation de Cyrnos passant du grec au latin.
Mais les Phéniciens avaient un autre mot pour désigner l'île. Ils l'appelaient également Korsai, qui signifie lieu couvert de forêts, ou d'une épaisse végétation, autre impression reçue par des hommes venant de régions déjà déboisées aux deux tiers au moins de leur surface. Korsai a donné Corsica en latin.
Les auteurs de l'antiquité expliquent volontiers le nom par des légendes. Salluste et, plus tard, saint Isidore (Traité des étymologies) évoquent le personnage d'une femme ligure, nommée Corsa, qui, la première, aurait découvert la Corse. Pour d'autres, Corsica viendrait des mots latins cor, poitrine, et sica, poignard. Ou bien le nom viendrait de Corsus, neveu d'Enée, et Sica, nièce de Didon, à qui la Corse aurait été donnée. On ne sait pas de quel texte ont été tirés ce neveu et cette nièce.
Un grammairien latin du Vème siècle de notre ère, Servius, puis un humaniste hollandais de la Renaissance, Gérard Vossius, ont repris une opinion de Diodore de Sicile et de Strabon à l'occasion du commentaire de la IXème églogue de Virgile. « Cette île se nomme Cyrne du nom de Cyrnus, fils d'Hercule.»
Laissons là ces gloses aussi fantaisistes que savantes. On peut être sur que ce sont ses promontoires et ses forêts, vus par des Grecs, qui sont à l'origine du nom de la Corse.

LES ARMES DE LA CORSE

La tête de More (ou de Maure) est une des pièces héraldiques les plus anciennes, puisqu'elle remonte aux croisades, époque à laquelle les chevaliers commencèrent à porter des emblèmes peints sur leur bouclier, pour se reconnaître, quand ils étaient en armure, visière baissée. Les seigneurs chrétiens faisaient symboliser à la tête de More un roi infidèle vaincu. Et ils incluaient ce signe dans leurs armoiries quand leur maison avait participé aux croisades. C'était le cas de l'Aragon. La tête de More figurait sur ses étendards et sur ses sceaux dès le XIII" siècle.
Les armes de la Corse dérivent de cette origine aragonaise. Les géographes avaient pris l'habitude de timbrer des quatre têtes de More de l'Aragon toutes les cartes de ses possessions.
Quand le pape Boniface VIII fait donation de la Corse et de la Sardaigne à Jayme Il d'Aragon, le 17 février 1297, il emploie le terme de « royaume de Sardaigne et de Corse» (regnum Sardinae et Corsicae), d'où la couronne royale comme ornement extérieur des armes de la Corse.
Pour établir une distinction entre les deux îles voisines, la Corse, sur les cartes, était timbrée d'un écu à une seule tête, au lieu des quatre désignant les autres possessions aragonaises.

La Corse indépendante conserva ces armoiries, dont les détails avaient varié selon les époques et les dessinateurs. Au cours de la Consulte tenue à Corti le 24 novembre 1762, il fut décidé que l'écu à tête de More, surmontée de la couronne royale, deviendrait l'emblème de la nation. Nous en avons un dessin officiel celui qui figure sur la page de titre de la Giustificazione della rivoluzione di Corsica, édition de 1764, et dans l'angle supérieur droit de la carte géographique dépliante à la fin du même ouvrage.
Les pièces de monnaie frappées sous Pascal Paoli reproduisaient ces armes, qu'on trouvait déjà à l'avers des pièces d'argent émises sous le roi Théodore, l'envers représentant la Vierge, sous la protection de qui la Consulte de 1735, à Corti, avait placé la Corse.
On pourrait maintenant définir ce blason, arrêté par la Consulte de 1762, de la manière suivante: sur un écu à peu près ovale, entouré de volutes, de rocailles, de coquilles et de palmes, à champ plain d'argent, une tête de sable (noire) dextre (c'est-à-dire tournée vers la gauche du lecteur, l'écu étant toujours supposé vu de face et non de l'intérieur) est coupée au ras des épaules en biseau, arrondie en arrière et en pointe incurvée par-devant. Il s'agit d'une véritable tête de Nègre, mais voulant représenter un Sarrasin. Elle a le front ceint du bandeau qui est signe de commandement et de souveraineté- « C'est la bandelette blanche qui, sous le nom de diadème, symbolisait la puissance des rois hellénistiques» (Jérôme Carcopino La Royauté des Césars).

A cette tête de More, dans le dessin de 1764 - qui doit être tenu, nous le rappelons, pour le dessin officiel - furent ajoutés des ornements, le collier de perles (en ce cas on dit que la tête de More est « colletée» ou « accolée») et des pendants d'oreilles qui, portés par un homme, sont signe de sauvagerie (la tête est alors dite « perlée»). L'écu est flanqué et tenu par deux tritons, les « gicanti marini » (géants marins) armés de massues qui sont de l'invention de Pascal Paoli Une couronne royale surmonte l'écu. On a voulu également faire appel à la légende et situer l'origine de la tête de More corse au VIIéme siècle, pendant la période où presque toute l'île aurait été islamisée.
D'autres auteurs ont cru que cet emblème datait du IXéme siècle, qui vit l'expulsion des Sarrasins
On s'accorde aujourd'hui à reconnaître que l'origine aragonaise dont nous venons de parler est la seule interprétation historique sérieuse, sinon certaine.
Pour les Corses, en tout cas, au long de leur histoire; à travers les clartés et les ombres jusqu'à nos jours encore, la tête de More est demeurée la figure symbolique de l'orageuse et envoûtante individualité de leur pays.